Jean-Paul Denanot : {“La formation professionnelle est la responsabilité la plus constante donnée aux Régions" }
Par Agathe Descamps - Le 16 novembre 2011.
Si la loi initiatrice de la formation professionnelle date de 1971, les Régions ont, quant à elles, été concernées à partir de 1982, avec la loi-cadre Defferre instituant la décentralisation. C'est Jean-Paul Denanot, président de la Région Limousin et de la commission formation professionnelle de l'Association des Régions de France (ARF), qui analyse ici l'évolution de la formation professionnelle au sein des Régions au cours de ces vingt dernières années.
“La formation professionnelle est la responsabilité la plus constante donnée aux Régions, car cette compétence n'a cessé d'être renforcée au fil des ans, par tous les gouvernements, qu'ils soient de droite ou de gauche", explique-t-il. Jusqu'à la “tentative de recentralisation qui a eu lieu avec la loi de 2009". Le président du Conseil régional du Limousin se félicite toutefois que ces dernières aient pu garder le pilotage des CPRDFP, “ce qui n'était vraiment pas gagné au départ".
Aujourd'hui, l'élection présidentielle approchant, il est légitime de demander à Jean-Paul Denanot comment la formation professionnelle serait gérée sous un gouvernement de gauche, avec des Régions elles-mêmes très majoritairement de gauche. “Un tel gouvernement donnerait les moyens aux Régions de gérer leurs compétences, et s'occuperait quant à lui des fonctions régaliennes telles que la santé, la sécurité et l'éducation, avec l'appui des Régions, bien entendu." Car, pour Jean-Paul Denanot, l'État idéal donnerait des orientations que les Régions exerceraient en toute liberté. Or, “nous perdons beaucoup d'énergie dans les négociations, alors qu'au niveau territorial, les conflits État-Région ne devraient pas exister."
Étape clé dans l'évolution de la formation professionnelle, la loi de 2004 a transféré la compétence des formations sanitaires et sociales aux Régions. “Cette loi a été assez mal préparée et nous avons eu beaucoup d'inquiétudes concernant les transferts financiers. Nous pensions que ce qui nous poserait le plus de souci serait le transfert des Tos[ 1 ]La loi du 13 août 2004 a transféré aux Conseil généraux et régionaux la gestion des personnels techniciens, ouvriers et de services (Tos) des collèges et des lycées. , mais en réalité, ce sont les formations sanitaires et sociales, car les coûts des formations étaient très difficiles à évaluer", se remémore Jean-Paul Denanot.
Trois grandes évolutions
Pour le président de la commission formation professionnelle de l'ARF, la formation professionnelle a connu trois grandes évolutions.
D'abord, l'idée de la sécurisation professionnelle, “évolution la plus significative, symbolisée par la création du FPSPP, qui a ensuite été pillé par l'État, mais l'idée de ce fonds était très bonne".
Autre fait important, l'aide des Régions à la formation des salariés, qui s'est matérialisée avec la crise de 2009 et les multiples dispositifs créés par les Régions avec un slogan : “Se former plutôt qu'être au chômage." “Cela a permis aux Régions et aux entreprises de travailler ensemble, et les salariés ont pu augmenter leur niveau de qualification. D'ailleurs, nous étions partisans de mettre tous les financeurs de la formation professionnelle autour de la table : l'État, les entreprises, Pôle emploi et les Régions, avec ces dernières comme coordinatrices. En effet, chacun émet des appels d'offres de son côté, et c'est une perte de temps", poursuit Jean-Paul Denanot.
Enfin, autre transformation essentielle dans l'évolution de la formation professionnelle, les innovations technologiques, qui impliquent à la fois une formation pour les salariés et demandeurs d'emploi qui souhaitent adapter leurs compétences ou travailler dans ce secteur, mais aussi la nécessité de pouvoir former à distance, avec la FOAD. “Dans les pays en voie de développement où je me rends régulièrement, le manque de formation professionnelle est l'élément majeur qui freine le développement économique. Ces pays comptent beaucoup d'universitaires, mais cela ne suffit pas. Il faut des personnes qui aient des qualifications professionnelles comme des ingénieurs, des techniciens, des ouvriers." Et puis, comment ne pas évoquer la VAE, qui permet “pour la première fois de reconnaître que l'entreprise est formatrice, tout comme la vie personnelle".
L'évolution de la formation professionnelle pose aussi la question de son avenir, et de sa gestion par les Régions : “L'idéal serait que les Régions aient un vrai rôle de coordination, ce qui ne signifie pas que l'État doive être absent. C'est lui qui impulse les nouvelles politiques industrielles dont découlent les besoins en formation et, donc, l'action des Régions. Il faut tout simplement que chacun soit dans son rôle, car la formation professionnelle est fondamentale pour l'avenir de notre pays", conclut Jean-Paul Denanot.
Notes
1. | ↑ | La loi du 13 août 2004 a transféré aux Conseil généraux et régionaux la gestion des personnels techniciens, ouvriers et de services (Tos) des collèges et des lycées. |