Gérard Cherpion : {“Retrouver la notion d'escalier social, propre à la formation" }
Par Philippe Grandin - Le 16 novembre 2011.
Gérard Cherpion, député UMP des Vosges (élu pour la première fois en 1993), est membre de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Il est l'auteur de la proposition de loi “pour le développement de l'alternance, la sécurisation des parcours professionnels et le partage de la valeur ajoutée", adoptée au Parlement le 13 juillet. Il est par ailleurs membre titulaire du Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), et élu du Conseil régional de Lorraine.
Centre Inffo - Quels sont, selon vous, les points forts du dispositif de formation continue au regard de la loi de juillet 1971 ?
Gérard Cherpion - La loi de juillet 1971 est une étape importante, car elle entérine la reconnaissance de la formation professionnelle comme outil de promotion sociale. Aujourd'hui, nous avons laissé de côté cette idée d'ascenseur social. Compte tenu de diverses périodes difficiles à forts taux de chômage, la formation professionnelle a changé de nature. Nous avons même constaté l'existence de formations “parking", c'est-à-dire sans débouchés directs sur des emplois, pendant ces mêmes périodes. Ces dernières ont également provoqué une évolution des négociations avec les partenaires sociaux, liée également à une évolution du syndicalisme, qui a abouti à une volonté claire et affichée de négocier à la fois sur la formation et l'emploi. Néanmoins, nous retrouvons à travers la loi de 2009 la notion d'escalier social propre à la formation.
Le congé individuel de formation hors temps de travail (Cif HTT), par exemple, va dans ce sens, car il permet à une personne de renouer avec l'essence même de la loi de 1971. Il traduit une volonté personnelle de reprendre une formation, à l'instar des bien connus cours du soir. Il existe certes une évolution de la formation qui s'inscrit directement dans l'activité économique. Les contenus des formations ne sont plus ceux de 1971 en raison de l'émergence de nouveaux métiers.
Centre Inffo - Au fil des diverses lois, comment interprétez-vous la complexification du dispositif de formation continue ?
Gérard Cherpion - Suite à la complexification inhérente à notre société, le législateur ainsi que les organismes de formation ont été amenés à faire évoluer le système de formation professionnelle. Cette évolution s'est toujours traduite par une complexité accrue des textes et donc des dispositifs mis en place. La loi de 2009 comporte des avancées importantes dans de nombreux domaines, même si la simplification souhaitée par le législateur ne semble pas être au rendez-vous.
Centre Inffo - Dans l'hypothèse d'une amélioration de la loi actuelle, qu'est-ce qui serait à maintenir, à améliorer, ou à revoir ?
Gérard Cherpion - Je pense que la loi actuelle doit évoluer au fur et à mesure de l'évolution des métiers et des technologies. De plus, le cadre de la loi doit lui-même changer en même temps que la qualité du dialogue social. Nous devons nous diriger vers davantage de conventions que de textes législatifs. Cette année, dans les entreprises et au sein des branches professionnelles, les accords et contrats ont pris une place beaucoup plus importante dans l'évolution de la loi sur la formation.
Centre Inffo - Retrouve-t-on toujours dans les lois successives de la formation l'état d'esprit des accords nationaux interprofessionnels (Ani) ?
Gérard Cherpion - Oui, les accords nationaux interprofessionnels ont servi de base aux textes législatifs et à leur enrichissement. Il existe bien une prise en compte des Ani. Par exemple, ma récente proposition de loi relative au “contrat de sécurisation professionnelle" consiste à inscrire dans le Code du travail un cadre très général en renvoyant aux partenaires sociaux la détermination de l'essentiel des modalités d'application.
Centre Inffo - Dans quelles directions voyez-vous évoluer la formation ?
Gérard Cherpion - Je la vois évoluer vers une individualisation des parcours. D'ailleurs, avec le nouveau contrat de sécurisation des parcours professionnels (CSP) qui figure dans ma proposition de loi, nous nous dirigeons vers un accompagnement très individualisé des personnes ayant subi un licenciement économique. Cette individualisation des parcours suppose d'avoir une vision des difficultés à venir, c'est-à-dire de dresser un diagnostic d'employabilité en amont, comme le fait l'Afpa, pour préparer les personnes à suivre de nouvelles formations. Elle nécessite également un accompagnement au changement, donc une vision prospective des métiers et des emplois de demain.