Jean-Claude Carle : {“La loi a consacré le paritarisme" }
Par Sandrine Guédon - Le 16 novembre 2011.
Jean-Claude Carle, sénateur de Haute-Savoie (UMP) depuis 1995, est membre des commissions “Formation tout au long de la vie", “Sport et jeunesse" et “Vie associative et éducation populaire". Il a présidé en 2009 la commission spéciale préparant la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Il est actuellement vice-président du Sénat, et membre du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV).
En quoi la loi de 1971 est-elle une loi fondatrice ?
Il faut replacer la loi de 1971 dans son contexte, celui de la fin des “Trente glorieuses". À cette époque, la France compte 300 000 chômeurs et 15 % d'une classe d'âge accède au bac… La loi “Delors" constitue une étape importante tant sur le fond que sur la méthode. Sur le fond, nous assistons à la reconnaissance de la formation professionnelle comme moyen d'adaptation au poste de travail dans un contexte de forte croissance et donc de forte demande en compétences et main-d'œuvre. La formation est reconnue comme un outil de promotion sociale. Et concernant la méthode, la loi consacre le paritarisme.
Quelles ont été à vos yeux les autres textes majeurs pour la formation professionnelle ?
En quarante ans, l'évolution de la formation professionnelle s'est faite par étapes, certaines très importantes. D'abord, en 1981, avec la création du secrétariat d'État à la Formation professionnelle. Ensuite, en 1984, avec ce que l'on pourrait appeler l'embryon du Dif ; 1993, avec la naissance des Opca ; 2000, avec la loi “Aubry" ; 2004, avec la reconnaissance du principe de formation tout au long de la vie ; et, enfin, 2009.
La loi “Wauquiez" s'appuie sur le constat que les 27 milliards d'euros de la formation professionnelle ne vont pas vers ceux qui en ont le plus besoin. Avant 2009, nous restions dans une logique de dépenses : certains employeurs préféraient payer plutôt que former. Et aussi dans une logique de ce que j'ai appelé, dans mon rapport, les “3 C" : complexité, corporatisme et cloisonnement. L'idée de la loi de 2009 a été de passer aux “3 P" : personne, partenariat, proximité.
Une loi qui a rempli son rôle, en termes de réforme ?
Oui, c'est une réforme globale qui intègre la formation initiale et continue. Elle fixe d'autres objectifs en s'appuyant sur le triptyque : formation, employabilité, emploi, en partant de l'évidence que l'emploi passe par une bonne formation et, donc, une orientation choisie plutôt que subie. Avec pour corollaire une information accessible à tous. Elle lève des freins tant au niveau de la personne que de l'entreprise, par la mise en place de mesures d'accompagnement, de conseil d'ingénierie, en confiant cette mission aux Opca. Enfin, elle inscrit la formation dans une logique d'investissement et, donc, de résultat et d'évaluation.
Que reste-t-il à faire, selon vous ?
Pour moi, il faudra aller plus loin dans deux domaines : il sera nécessaire de réformer le financement de l'apprentissage et de créer un “compte épargne formation".
Mais qu'en est-il de la simplification d'un système jugé encore trop complexe ?
Attention, quand on “simplifie", souvent, on ajoute ! Ce qui compte, c'est que le système soit simple pour celui qui en a besoin. Pour le reste, le système a besoin de tuyaux pour fonctionner. Les financements, par exemple, resteront toujours compliqués. L'essentiel, c'est qu'ils arrivent aux destinataires sans perte en ligne.
Quelle est la place du travail des parlementaires dans ces évolutions ?
Il y a d'abord le temps “social". La politique se fait au Parlement, qui doit jouer son rôle dans ce domaine stratégique qu'est la formation initiale et continue. Il l'a d'ailleurs très bien fait au travers de la loi “Wauquiez" et tout particulièrement le Sénat. Il est aussi dans son rôle avec la loi sur l'alternance qui a été proposée par un parlementaire. Je considère d'ailleurs que le Parlement devrait être plus présent concernant l'Éducation nationale. Trop de décisions se prennent notamment au plan financier par circulaires confinant le Parlement à un rôle trop “contemplatif".
Quelle est l'articulation du travail parlementaire avec ce “temps social" ?
Le travail des partenaires sociaux est constitutif et doit être respecté. Les Ani sont repris en partie par les lois, qui peuvent aller plus loin que les textes interprofessionnels. Au final, le Parlement décide, tout en respectant ce “temps social".