Patrick Gonthier, secrétaire général de l'Unsa Éducation : “Pour une université tout au long de la vie"
Par Benjamin d'Alguerre - Le 16 juin 2011.
L'Unsa ne fait pas partie des cinq centrales syndicales habilitées à signer des accords nationaux, mais n'en reste pas moins une organisation particulièrement représentée à l'université et dans l'Éducation nationale. À l'occasion de sa participation à la 38e Conférence des services universitaires de la formation continue (voir notre article), Patrick Gonthier a répondu à nos questions.
Vous revenez d'Athènes où se tenait la Conférence européenne des syndicats[ 1 ]12e congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES). . Les politiques d'austérité décidées en Europe peuvent-elles impacter la participation des universités à la formation tout au long de la vie ?
La “stratégie de Lisbonne" stipulait qu'à l'horizon 2020, 50 % d'une classe d'âge pourrait accéder à l'enseignement supérieur. Cet objectif est actuellement en panne et plusieurs gouvernements diminuent les crédits des universités. Or, diminuer leurs crédits réduit, de fait, les crédits alloués à la recherche, et si ces investissements diminuent aussi, cela impactera durablement le niveau des universités et la qualité de leurs formations. En France, l'enseignement supérieur a été épargné, puisque c'est l'enseignement secondaire qui a majoritairement fait les frais de cette politique d'austérité. Dans d'autres pays, l'enseignement supérieur est plus durablement touché.
L'université peut-elle devenir un acteur déterminant de la formation continue ?
Cette 38e Conférence des directeurs de SUFC démontre bien que les stéréotypes qui présentaient l'université comme une institution figée et peu ouverte sur l'entreprise sont faux. L'enseignement supérieur a connu d'importantes mutations en vingt ans. La loi Delors de 1971 a bien été intégrée par l'université qui s'est développée sur le thème de la formation continue.
La FCU ne représente pourtant que 4 % de la formation des adultes…
Sur un plan strictement comptable, peut-être. Mais si l'on prend en compte tout l'éventail que l'université met au service de la formation des adultes, qu'il s'agisse de stages, de licences professionnelles, de processus de VAE, etc., le chiffre oscille entre 10 et 14 % du marché, et nous pouvons espérer voir ce taux augmenter. À terme, l'université française a des atouts pour tendre vers davantage de formations tout au long de la vie. Elle enregistre de bons résultats, ses réseaux sont denses, la qualité de son enseignement est reconnue et elle dispose d'une excellente expérience en matière de formation professionnelle à tous les niveaux. De toute façon, toutes les universités en Europe seront amenées à muter vers davantage de formation continue, que ce soit pour des raisons financières (le besoin de trouver de nouvelles ressources) ou pour pallier le vieillissement de la population. En Allemagne ou dans les pays scandinaves, plusieurs pôles universitaires ont été contraints de miser sur la formation tout au long de la vie pour maintenir un nombre d'étudiants suffisant en leur sein pour continuer à fonctionner !
L'université française ne risque-t-elle pas d'être le parent pauvre du futur service public de l'orientation, actuellement mis en chantier ?
C'est vrai. Lorsqu'il évoque le lieu unique d'orientation, le DIO Jean-Robert Pitte évoque très peu l'université. Dans certaines régions, comme Rhône-Alpes, il existe près de 70 dispositifs d'orientation, ce qui a de quoi égarer n'importe qui, et pourtant, on pense très peu à l'enseignement supérieur comme partenaire susceptible de faire partie de ce lieu unique de l'orientation. Mais cela provient essentiellement d'une vision tronquée de la formation tout au long de la vie. Actuellement, la formation des adultes est encore perçue comme une “ré-orientation" pour personnes peu qualifiées, et très rarement comme un nouveau choix professionnel. Au-delà, nous subissons encore trop, en France, le poids du diplôme initial. L'Unsa va bientôt rencontrer la ministre de l'Enseignement supérieur Valérie Pécresse pour porter la parole de l'“université tout au long de la vie".
Notes
1. | ↑ | 12e congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES). |