Divergences autour du projet d'annexe financière 2016-2017 du Fonds paritaire

Par - Le 23 décembre 2015.

La signature du projet d'annexe financière 2016-2017 du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) entre l'État et les partenaires sociaux devrait prendre plus de temps que prévu. Alors que les premiers tablaient sur un paraphe final avant la fin de l'année, les exigences de l'État en matière d'opérations à financer ont conduit les interlocuteurs à programmer au moins deux nouvelles réunions courant janvier.

C'était une première dans l'histoire du FPSPP : au lieu de prévoir son programme financier pour une seule année comme cela avait été le cas jusqu'alors, le Fonds avait planifié une maquette d'1,45 milliard d'euros portant sur deux ans ([notre article->]). « Une opération rendue possible par la réforme qui a permis au Fonds de disposer d'une meilleure visibilité sur les collectes à venir. En outre, la gestion extrêmement prudente des ressources du FPSPP lui a permis d'accumuler les excédents sur les appels à projets. Grâce à cela, Philippe Dole, son directeur, a pu concevoir un programme sur deux ans que les partenaires sociaux ont validé. C'était important à un moment où il était nécessaire de mettre le paquet sur la formation », explique Philippe Couteux, secrétaire confédéral CFDT en charge de la politique salariale. Le projet avait d'ailleurs été accueilli unanimement par l'ensemble des organisations siégeantes, syndicales comme patronales.

340 millions pour les 150 000 formations d'urgence

De fait, c'est avec ce projet sur la table que les partenaires sociaux ont entamé, fin novembre, les négociations avec le cabinet du ministère du Travail pour examiner le projet d'annexe financière. « Mais l'État est venu avec des demandes très fortes… », se souvient le cédétiste. Des demandes portant en premier lieu sur le plan « 150 000 formations d'urgence » que le Premier ministre avait annoncé à l'issue de la dernière conférence sociale du 19 octobre 2015 et que le ministère a demandé au Fonds d'assumer financièrement seul. « Sébastien Jallet, le directeur adjoint du cabinet de Myriam El Khomri, qui conduit la négociation côté État, a demandé au FPSPP d'assurer les abondements nécessaires pour alimenter les comptes personnels de formation des 150 000 demandeurs d'emploi concernés », résume un administrateur patronal. Refus du Fonds. Non seulement pour des raisons budgétaires (le FPSPP devant, dans cette configuration, débourser quasiment seul 340 millions sur les 390 budgétés, le reliquat étant pris en charge par Pôle emploi), mais aussi à cause du caractère exclusif de l'opération, centrée sur le seul CPF [ 1 ]Compte personnel de formation.. « Or, il existe d'autres outils qui peuvent être mobilisés pour ce projet, comme la POE [ 2 ]Préparation opérationnelle à l'emploi.. De plus, on ne peut pas faire du CPF – instrument individuel – le socle d'une telle opération collective », assure Philippe Couteux. D'autant que pour l'heure, la participation des Conseils régionaux demeure encore inconnue alors que les nouveaux exécutifs territoriaux n'ont pas encore été déterminés.

R2F: "une demande exorbitante de l'État"

Autre point de tension : le financement de la rémunération de fin de formation (R2F), cette allocation qui rémunère les chômeurs en formation. Là encore, du fait d'une demande financière du ministère jugée excessive. « À l'heure où ses caisses sont vides, l'État ne veut pas mettre un euro là-dedans alors qu'habituellement, ces financements étaient assurés à 50/50. Ici, ce serait au seul FPSPP de mettre sur la table les 194 millions d'euros nécessaires», explique un administrateur du Fonds. Soit, pour 2016, 177 millions d'euros destinés à financer les R2F des demandeurs d'emploi déjà en formation, auxquels s'ajoute une enveloppe supplémentaire de 17 millions destinée à ceux qui entreront en formation l'année prochaine. « Le problème, c'est que la R2F se déclenche dix-huit mois après l'entrée en formation et s'étend sur plusieurs années. Dans cette configuration, cela signifie que les budgets que devra engager le FPSPP à l'horizon 2017-2018 s'élèveront à 190 millions », calcule Philippe Couteux. Déraisonnable aux yeux des partenaires sociaux. Sur ce point, l'État a cependant revu sa position, proposant une contribution équivalente à près d'un quart de la somme. Resteraient tout de même 144 millions à débourser pour le FPSPP. «Une demande exorbitante », résume le syndicaliste.

Sans compter que la récente déclaration de Manuel Valls sur un nouveau plan de formation d'urgence des demandeurs d'emploi laisse entendre que le Fonds devra se mobiliser en 2016 sur ce nouveau projet, qui n'a pas encore été budgété puisque son annonce se fera au mois de janvier. D'où l'importance, pour ses administrateurs, de conserver de l'argent en caisse. Là-dessus, les partenaires sociaux restent dans l'expectative et le sujet devrait occuper une partie des débats des deux séances de discussion planifiées le mois prochain.

Notes   [ + ]

1. Compte personnel de formation.
2. Préparation opérationnelle à l'emploi.