Accord du 14 novembre 2008 sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
Par Centre Inffo - Le 10 avril 2009.
Négociation GPEC : réserve des syndicats sur la signature de l'accord
Après six séances, la négociation sur la GPEC s'est achevée le 14 novembre sur un projet d'accord ouvert à la signature. Les syndicats réservent pour le moment leur réponse.
Les partenaires sociaux ont achevé le 14 novembre la négociation interprofessionnelle sur la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) par un projet d'accord. Aucun syndicat n'a souhaité alors indiquer s'il pourrait signer ce texte.
Bien que la CFDT et la CFE-CGC aient affiché leur satisfaction, les deux confédérations ont déclaré vouloir attendre l'issue des négociations en cours sur la formation professionnelle et l'assurance chômage. D'autres syndicats, notamment la CGT, ont déclaré qu'ils ne signeraient que si le texte était modifié.
De son côté, Bernard Lemée, représentant du Medef et chef de file de la délégation patronale, s'est dit “plutôt optimiste" sur le nombre d'organisations potentiellement signataires. “Chacune a reconnu que le texte avait beaucoup évolué sur des points fondamentaux."
Concernant l'articulation de cette négociation avec les autres négociations, “elle fait partie de l'accord lui-même, puisqu'il précise qu'il n'entrera en vigueur que lorsque les conclusions des groupes de travail auront fait l'objet d'avenants et après l'achèvement de la négociation sur la formation professionnelle, note Bernard Lemée. Il y a un lien évident entre GPEC et formation professionnelle. Nous devons donc veiller à ce que ces négociations menées en parallèle mettent en place des dispositifs cohérents".
Bilan d'étape professionnel
Le projet d'accord prévoit l'instauration d'un bilan d'étape professionnel destiné à la réalisation d'un diagnostic individuel des compétences des salariés –lequel doit favoriser la réalisation d'un diagnostic global au sein de l'entreprise. Objectifs : “permettre aux salariés d'être acteurs de leur déroulement de carrière, de favoriser leur engagement dans le développement de leurs compétences et de leur qualification et de leur donner des outils susceptibles de les aider dans la construction de leur parcours professionnel". Le bilan d'étape professionnel sera ouvert aux salariés qui le souhaitent tous les cinq ans, sans que l'employeur puisse s'y opposer. Par ailleurs, l'année où le bilan sera réalisé, le salarié devra envisager avec l'entreprise les moyens à mettre en œuvre, notamment en termes de formation ou de mobilité.
Le projet d'accord renvoie à un groupe de travail le soin de définir les modalités de mise en œuvre et le contenu du bilan d'étape professionnel. À ce sujet, Alain Lecanu, secrétaire national de la CFE-CGC, a déploré que “le bilan d'étape professionnel soit seulement mis en œuvre à l'initiative du salarié. Il aurait fallu le rendre obligatoire pour tous les salariés, ce qui aurait bénéficié aux salariés les plus éloignés de l'emploi".
Bien qu'il approuve “l'approche positive" du texte, particulièrement le projet de création d'un bilan d'étape professionnel et la dissociation “claire" entre GPEC et PSE, Alain Lecanu reste prudent. “Ce texte est une première étape, mais il faudra attendre la fin des négociations de l'assurance chômage et de la formation professionnelle pour juger de l'ensemble", a-t-il précisé. Sa confédération ne se prononcera donc pas avant décembre, en tout état de cause une fois passée l'échéance des élections prud'homales, le 3 décembre.
La CFTC se félicite au contraire que le bilan d'étape professionnel ne soit pas devenu une obligation. La mise en œuvre de ce bilan, déjà inscrit dans l'accord du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, “se présente sous les auspices les plus vagues", déplore Olivier Gourlé, secrétaire confédéral de la CFTC chargé de la formation professionnelle. “Son positionnement par rapport au bilan de compétences reste flou, ajoute-t-il. Le bilan d'étape professionnel doit servir plus spécifiquement dans le cadre d'une GPEC. Si on le fait dans un esprit loyal et ouvert, très bien, mais le projet du Medef renvoie sa construction à un groupe de travail ultérieur." Conclusion : “Difficile d'approuver cet accord sans savoir comment le bilan d'étape professionnel va être concrètement appliqué." Olivier Gourlé approuve en revanche son caractère optionnel. “Au moins, certains dirigeants d'entreprise ne seront pas tentés d'utiliser le bilan d'étape professionnel pour réduire la masse salariale, sous prétexte de GPEC", espère le responsable CFTC.
Il ajoute par ailleurs que “la dissociation GPEC-PSE n'est toujours pas assez claire. Les accords GPEC déjà signés deviendront-ils caducs ? Un PSE pourra-t-il être signé en l'absence d'ouverture de négociation sur la GPEC ?" Autant de questions qui restent en suspens aux yeux de la confédération.
La CGT et FO estiment également que le bilan d'étape professionnel “ne doit pas se substituer au bilan de compétences, qui est devenu un outil pour les salariés".
En outre, Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, n'est “pas pressé" de parapher le projet d'accord interprofessionnel sur la GPEC. “La GPEC, on n'est pas pressés, ce n'est pas la négociation du siècle, a expliqué le secrétaire général de FO. Le bureau confédéral va décider, mais pas aujourd'hui. C'est un texte plein de contradictions et d'ambiguïtés."
GPEC et licenciement économique
L'article 7 porte sur la GPEC et le licenciement économique. “Les procédures de GPEC et de licenciement économique devaient être dissociées, comme le fait la loi elle-même", a précisé Bernard Lemée. Selon le projet d'accord, la GPEC n'a pas vocation à préparer les procédures de licenciements collectifs. “Elle n'est donc pas une étape préalable aux procédures de licenciements collectifs et aux PSE (plans de sauvegarde de l'emploi) qui obéissent à des règles spécifiques, et doit, de ce fait, être dissociée de leur gestion." Cette disposition du texte constitue toujours un point de blocage, dans la mesure où certains syndicats y voient une volonté du patronat de contrer la jurisprudence, qui crée l'obligation d'ouvrir des négociations sur la GPEC avant la mise en place d'un PSE.
Philippe Grandin
Inffo Flash, n° 735, 1-15 décembre 2008