Formateur à temps partiel : attention à la requalification à temps plein !
Employer un formateur à temps partiel nécessite la plus grande vigilance. C'est la leçon qu'il faut tirer de la décision de la Cour de cassation du 25 janvier 2023.
Par Valérie Michelet - Le 18 septembre 2023.
Dans cette affaire, un formateur faisait valoir que ses horaires n'étaient pas fixés d'un commun accord mais unilatéralement par l'employeur. Il demandait donc la requalification de son temps de travail à temps plein (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 janvier 2023, 20-20.679).
Rappelons que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (article L3123-6 du Code du travail).
L'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve :
- de la durée exacte du travail hebdomadaire ou mensuelle convenue ;
- que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.
Il convient, dans un premier temps, de bien identifier tous les temps de travail : préparation, face à face pédagogique, suivi, correction ... Ainsi, les juges de la Cour de cassation ont approuvé les juges du fond d'avoir décidé qu' « outre le temps de face à face pédagogique, était prévu (au contrat de travail) un temps de préparation, dans lequel pouvait raisonnablement être intégré le temps de participation aux réunions pédagogiques » (Cass. soc. du 22 septembre 2016, 15-16.169).
Dans un second temps, il faut que l'employeur produise l'écrit mentionnant la répartition du travail du formateur. Une annexe contractuelle qui fixe les jours d'intervention et les horaires des salariés répond pour la Cour de cassation à cette exigence (Cass. soc. du 22 septembre 2016, 15-16.169 - Cass. soc. du 21 septembre 2016, 15-11.033). La preuve de la répartition du temps de travail peut également être rapportée s'il a été "convenu avant le démarrage de l'année scolaire les temps et les jours d'intervention [du formateur], ses dates et ses heures d'intervention étaient une nouvelle fois convenues à l'avance, soit par téléphone, soit à la suite d'un entretien puis confirmées par écrit dans des courriers, que [le formateur] a toujours travaillé conformément à ces plannings d'intervention en tout point conformes aux plannings des étudiants, que ces derniers n'ont quasiment pas été modifiés sur toute la durée de la relation contractuelle" (Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2018, 17-18898). En revanche, tel n'est pas le cas si, en l'absence d'écrit, les bulletins de paye font apparaître selon les mois des durées variant de 10 à 30 h de cours par semaine (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 décembre 2014, 13-23.143). La répartition des horaires doit donc faire soit l'objet d'une mention dans le contrat, soit d'une annexe à ce dernier.
Dans l'affaire du 25 janvier 2023, un tel écrit faisait défaut : seuls des plannings étaient transmis au formateur. Les juges de la Haute cour censurent donc les juges du fond qui avaient rejeté la demande de requalification du formateur.
Ces derniers avaient à tort retenu les éléments suivants :
- le formateur était, au cours de l'été précédent l'année scolaire, consulté sur ses disponibilités afin de déterminer les jours et dates de ses interventions chaque semaine ;
- le formateur était en mesure de faire valoir ses préférences et empêchements, y compris sur la composition des groupes d'élèves et les cours enseignés, ses horaires étant adaptés selon les mois à ses nouvelles disponibilités lorsqu'ils les faisaient connaître à son employeur.
Pour les juges de la Cour de cassation, ces motifs "ne suffisent pas à caractériser que l'employeur faisait la preuve de ce que le salarié n'avait pas été placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il ne devait pas se tenir constamment à la disposition de l'employeur".
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Pour aller plus loin (accès abonnés) : Fiche 17-9 : Durée et aménagement du temps de travail des formateurs