Insaisissabilité de droit du domicile de l'entrepreneur individuel
Les prestataires de formation peuvent être aussi bien des personnes morales que des personnes physiques. Ces dernières optent parfois pour le régime de l'entrepreneur individuel pour exercer leur activité.
L'article 206 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques dite « Loi Macron » a prévu l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel (article 206).
Le décret n° 2016-296 du 11 mars 2016 relatif à la simplification de formalités en matière de droit commercial modifie le Code du commerce ainsi que le décret n°98-247 du 2 avril 1998 relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers pour tenir compte de l'insaisissabilité de droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel
Par Valérie Michelet - Le 14 mars 2016.
Situation antérieure à la loi Macron
L'insaisissabilité des biens fonciers non professionnels appartenant à un entrepreneur individuel, à l'égard de ses créanciers professionnels était subordonnée à l'accomplissement d'une déclaration faite devant notaire. Or dans les faits, cette déclaration était rarement pratiquée, notamment parce qu'elle nécessitait des formalités substantielles mais aussi en raison de son coût, jugé trop onéreux.
Dans un objectif de simplification l'article 206 de la loi Macron, qui figure dans la section 1 (« Alléger les obligations des entreprises ») du chapitre IV (« Simplifier ») du titre II (« Investir ») du texte, modifie les dispositions du Code du commerce et pose le principe d'une insaisissabilité de droit. Cette dernière est cependant limitée à la seule résidence principale de l'entrepreneur individuel, et à l'égard de ses seuls créanciers professionnels (ceux dont la créance est née après le 8 août 2015).
Art. L526-1 du Code du commerce
La résidence principale
Cette insaisissabilité ne joue pas pour les autres biens fonciers non affectés à un usage professionnel appartenant à l'entrepreneur individuel (exemple : résidence secondaire). Pour ces biens, l'insaisissabilité reste subordonnée à une déclaration notariée. Mais elle s'applique à la résidence principale en toute circonstance.
Il est désormais précisé que « lorsque la résidence principale est utilisée en partie pour un usage professionnel, la partie non utilisée pour un usage professionnel est de droit insaisissable, sans qu'un état descriptif de division soit nécessaire ». Et de la même manière, « la domiciliation de la personne dans son local d'habitation (…) ne fait pas obstacle à ce que ce local soit de droit insaisissable, sans qu'un état descriptif de division soit nécessaire ».
Art. L526-1 du Code du commerce
Portée de l'insaisissabilité de droit
a. Sur le fond
Cette insaisissabilité de droit n'est pas opposable à l'administration fiscale lorsque celle-ci relève, à l'encontre de l'entrepreneur individuel, soit des manœuvres frauduleuses, soit l'inobservation grave et répétée de ses obligations fiscales.
Art. L526-1 du Code du commerce
En cas de cession des droits immobiliers sur la résidence principale, le prix obtenu demeure insaisissable, sous la condition du remploi dans le délai d'un an des sommes à l'acquisition par l'entrepreneur individuel d'un immeuble où est fixée sa résidence principale.
Cette insaisissabilité de droit sur les biens fonciers, bâtis ou non bâtis, non affectés à l'usage professionnel peut, à tout moment, faire l'objet d'une renonciation.
Enfin, les effets de l'insaisissabilité de droit subsistent également après la dissolution du régime matrimonial lorsque l'entrepreneur individuel est attributaire de sa résidence principale. Ils subsistent également, quelle que soit la source de l'insaisissabilité, en cas de décès de celui-ci, mais, en vertu d'une précision apportée par l'amendement, jusqu'à la liquidation de la succession seulement.
Art. L526-3 du Code du commerce
b. Sur la forme
Le décret n° 2016-296 du 11 mars 2016 modifie l'article R123-46 relatif aux déclarations modificatives obligatoires incombant aux personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés.
Est désormais soumise à l'obligation d'une demande d'inscription modificative :
- la déclaration d'insaisissabilité des droits de la personne physique immatriculée sur tout bien foncier non affecté à son usage professionnel telle que prévue à l'article L526-1 du Code du commerce (et non plus comme c'était le cas avant la loi Macron sur tout bien ou est fixée sa résidence principale) ;
- la renonciation à la déclaration d'insaisissabilité ou à l'insaisissabilité de ses droits sur la résidence principale ou la révocation de la renonciation à l'insaisissabilité de ses droits sur la résidence principale prévues à l'article L526-3 du Code du commerce.
Le décret modifie en conséquence aussi le chapitre VI « de la protection de l'entrepreneur et du Conjoint » du Titre II « des garanties », du livre V « des effets de commerce et des garanties », de la partie règlementaire du Code du commerce en créant une section intitulée « de l'insaisissabilité.
L'article R526-1 qui prévoyait que la déclaration notariée d'insaisissabilité était indiquée dans la demande d'immatriculation est remplacé. Doivent être aujourd'hui indiqués dans la demande d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de la personne physique :
- la déclaration d'insaisissabilité de ses droits sur tout bien foncier non affecté à son usage professionnel, prévue à l'article L. 526-1 du Code du commerce ;
- la renonciation à l'insaisissabilité de ses droits sur la résidence principale prévue à l'article L526-3 du Code du commerce ;
- dans tous les cas, le lieu de la publication de ces déclarations.
Enfin, l'article R562-2 précise que doivent, dans un délai d'un mois, faire l'objet d'une demande d'inscription modificative au registre du commerce et des sociétés :
- la renonciation à l'insaisissabilité des droits sur la résidence principale de la personne physique immatriculée ou sa révocation, prévues à l'article L526-3 du Code du commerce ;
- la déclaration d'insaisissabilité des droits de la personne physique immatriculée sur tout bien foncier non affecté à son usage professionnel, prévue à l'article L526-1, ou sa révocation prévue à l'article L526-3 du Code du commerce.
Décret n° 2016-296 du 11 mars 2016 relatif à la simplification de formalités en matière de droit commercial (JO du 13.3.16)