Nouvelle instruction de France Travail sur la POEI

L'instruction de France Travail du 22 juillet 2024 remplace celle de 2022

Par - Le 08 août 2024.

Contexte : La loi « Plein emploi » a posé les bases d'une fusion des deux dispositifs de l'AFPR et de la POEI (voir notre article) ; un décret a récemment été pris pour en préciser certains points d'application (voir notre article).
Tenant compte de la fusion, et suppression subséquente de l'AFPR, l'instruction du 22 juillet 2024 est uniquement dédiée à la POEI.

Les principales nouveautés de l'instruction par rapport à celle qui la précède et résultantes de la réforme sont ci-après exposées, en sus du rappel de quelques dispositions constantes entre les deux instructions. Certains ajouts ou précisions rédactionnels non spécialement liés à la fusion des dispositifs sont également signalés.

Sur les destinataires de la POEI

En préambule comme dans la partie de l'instruction relative aux publics concernés par la mesure de POEI, figure le travailleur handicapé employé dans une entreprise adaptée [nouvellement bénéficiaire spécifique de la POEI – à noter que le cas d'une personne en situation de handicap – travailleur handicapé – était envisagé dans l'ancienne instruction, pour certaines dérogations notamment liées à l'horaire de travail du contrat à temps partiel proposé à l'issue du dispositif].

Rémunération en cas de suspension d'un contrat d'insertion pour réaliser une POEI

L'instruction généralise le maintien de la rémunération par l'employeur prévu pour les salariés en CUI ou CDDI lorsqu'ils suspendent leurs contrats pour effectuer une POEI chez un autre employeur [obligation de maintien de la rémunération indiquée précédemment comme exclue pour l'AFPR].

Modalités de mise en œuvre de la POEI

L'instruction présente ainsi les modes de formation qui peuvent être appliqués dans le cadre de la POEI :
« La formation peut être réalisée :

  • en modalité « 100% tutorat » : la période en entreprise doit être de la durée totale de la POEI [le recours à un tuteur est une évolution du dispositif de POEI ; l'instruction précédente envisageait des cas de tutorat pour l'AFPR] ;
  • en modalité « formation théorique » auprès d'un organisme de formation (interne ou externe), certifié QUALIOPI, modalité distancielle y compris ;
  • en modalité « AFEST » dans le cadre du marché national ;
  • en modalité « hybride » [:] formation théorique au sein d'un organisme de formation avec tutorat ou AFEST.

[Conformément à une récente délibération (voir notre actualité), la durée maximale de la période en entreprise comprise dans la formation pour une POEI (50 %), hors AFEST, n'est plus spécifiée].

La formation réalisée ne peut faire intervenir qu'un seul organisme de formation qu'il soit interne ou externe à l'employeur. Si un module de formation ne peut être réalisé par l'organisme de formation choisi par l'employeur, il appartient à cet organisme de formation de sous-traiter la partie de la formation qu'il ne peut pas réaliser lui-même ».

Il est ajouté que dans le cadre d'une POEI incluant du tutorat, l'employeur doit fournir un plan de développement des compétences par stagiaire.

Prestataires de la formation

Dans le cadre d'un tutorat, il est indiqué que celui-ci peut être réalisé dans un autre établissement de l'entreprise. Dans ce cas, il faut nécessairement un lien juridique entre l'employeur signataire de la convention et l'établissement d'accueil pour la formation (que celui-ci se trouve en France ou à l'étranger). Ce lien garantit que l'employeur aura bien les moyens de mettre en œuvre ou de faire respecter les engagements prévus dans le plan de formation [indication héritée de la fusion, qui était propre à l'AFPR dans la précédente instruction].
L'instruction précise nouvellement les garanties à respecter dans le cadre du choix du tuteur (qui peut être l'employeur lui-même), ainsi que les missions de ce dernier. Elle indique en outre que l'employeur s'engage à remettre au stagiaire une attestation de développement de compétences pour la période réalisée en tutorat.
Elle précise encore que lorsque le tuteur est choisi parmi les salariés de l'entreprise, l'employeur lui laisse le temps nécessaire pour exercer ses fonctions et se former.

Emplois concernés à l'issue de la mesure

La fusion des deux dispositifs de la POEI et de l'AFPR a conduit à un remaniement des consignes relatives à la nature et durée du contrat de travail proposé à l'intéressé à l'issue de sa formation POEI. Celui-ci doit être, suivant la nouvelle instruction, soit :

  • un contrat à durée indéterminée (CDI, CDII, CUI, contrat de professionnalisation) ;
  • un contrat à durée déterminée (CDD, CUI, CDDI) d'une durée minimale de 6 mois ;
  • un contrat de professionnalisation à durée déterminée ou un contrat d'apprentissage d'une durée minimale de 6 mois ;
  • un contrat à durée déterminée ou un contrat de mission conclu dans le cadre d'un emploi saisonnier d'une durée minimale de 4 mois (au sens du 3° des articles L1242-2 et L1251-6 du Code du travail) ;
  • un ou plusieurs contrats de mission, d'une durée totale d'au moins six mois dans les neuf mois suivant la formation et en lien étroit avec la POEI ; ces contrats peuvent être conclus également par une entreprise de travail temporaire d'insertion [cette possibilité était prévue pour l'AFPR dans l'instruction remplacée].

Durée de la formation

La thématique fait l'objet d'un sous-niveau.

« La durée de la POEI est variable en fonction de la modalité choisie et/ou du contrat de travail proposé :

  • si elle se réalise en 100% tutorat ou aboutit à un CDD ou un contrat de mission d'une durée minimale de 4 mois dans le cadre d'un emploi saisonnier, sa durée est limitée à 300 heures ;
  • si elle se réalise en modalité hybride (organisme de formation interne ou externe + période en tutorat ou AFEST) ou intégralement en organisme de formation interne ou externe, ou dans le cadre de l'AFEST, sa durée est limitée à 450 heures ;
  • si elle est mise en place pour un stagiaire relevant du Plan d'investissement dans les compétences, avec l'intervention d'un organisme de formation interne ou externe, sa durée est limitée à 600 heures.

La formation avant embauche doit être réalisée dans un délai maximum de 6 mois. Cette condition ne s'applique pas aux bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés pour lesquels le délai de réalisation peut être adapté ».

La précédente instruction de 2022 mentionnait en principe un financement limité à 400 heures de formation pour les deux dispositifs – sauf initiative régionale dérogatoire validée, dérogations issues de délibérations, ou décision de prise en charge bonifiée financée dans le cadre du PIC.

Plafonnement du montant de l'aide

L'instruction indique que le montant de l'aide est plafonné :

  • à 5 euros net maximum par heure de tutorat, lorsque la formation est réalisée en tout ou partie en tutorat [plafond propre à l'AFPR sans initiative régionale dérogatoire validée dans l'instruction précédente] ;
  • au montant du devis établi par l'organisme de formation et validé par France Travail, pour les formations réalisées en organisme de formation interne ou externe à l'entreprise ou en modalité hybride ou dans le cadre de l'AFEST. La prise en charge financière par la POEI ne concerne que les heures en centre de formation, les heures en entreprises ne sont pas financées [la précédente instruction n'envisageait pas un cas de détermination du montant – plafond – de l'aide pour l'un ou l'autre dispositif, sur la base d'un devis validé].

Versement de l'aide

Il est indiqué entre autres, quant au versement, les modalités suivantes.

Lorsque la formation est réalisée par :

  • l'organisme de formation interne du futur employeur ou sous forme de tutorat, l'aide de France Travail est versée directement à l'employeur ;
  • l'organisme de formation externe, l'aide de France Travail lui est directement versée [dans le cadre d'une AFPR, suivant la précédente instruction, l'employeur se chargeait de payer l'organisme de formation].

Dans le cas d'une POEI en modalité hybride, l'aide de France Travail est versée à l'employeur, charge à lui de reverser à l'organisme de formation le montant du devis validé.

Autres points d'attention

Sur les cas de dérogation à l'intensité horaire de l'emploi proposé

Dans le cadre d'un temps partiel, la présentation des possibles de dérogation à la durée minimale hebdomadaire de l'emploi à l'issue du dispositif diffère sensiblement de celle de la précédente instruction ; l'instruction de 2024 s'en remet explicitement aux cas légaux. Il est ainsi énoncé que la loi prévoit des dérogations à la durée minimale pour certaines catégories de salariés ou sur « demande individuelle du salarié » [précision nouvelle] :

« Des adaptations peuvent donc être acceptées dans certaines situations, si elles sont motivées pour faciliter le reclassement (et non par des intérêts économiques de l'entreprise), notamment :

  • lors d'une demande du salarié pour lui permettre soit de faire face à des contraintes personnelles, soit de cumuler plusieurs activités ;
  • dans le cadre de contrat de travail conclu dans certains secteurs comme le CDI intermittent pour un conducteur de transport scolaire par exemple ;
  • pour les bénéficiaires de l'obligation d'emploi ayant des aménagements d'horaires ».

Sur les modalités pédagogiques de la formation et contrôles

Comme la précédente, l'instruction présente les modalités de formation. Elle détaille davantage les modalités pédagogiques pouvant être choisies (notamment, description de la physionomie de l'AFEST et les intervenants).
Il est exigé que l'organisme de formation externe ou interne soit déclaré et certifié Qualiopi.

Et l'instruction informe « France Travail procède à des contrôles afin de s'assurer de la qualité des formations […] et se réserve aussi le droit de procéder à des contrôles en entreprise ainsi qu'à des contrôles sur pièces. Si de graves non-conformités sont identifiées, des sanctions pourront être mises en œuvre ».

Sur les formations par des organismes hors de France ou réalisées à l'étranger

Certains ajouts rédactionnels sont à noter. Ainsi :

  • pour une formation réalisée par un organisme étranger dans un pays de l'EEE ou en Suisse, la prise en charge par France Travail est prévue « sous réserve que l'organisme de formation européen ait une représentation en France » [nouvellement précisé].
  • En cas de formation réalisée à l'étranger, le stagiaire ne peut pas bénéficier de l'aide à la mobilité « sauf cadre dérogatoire pour les formations réalisées en Europe. Concernant l'aide à la garde d'enfants, pour en bénéficier, l'action doit se dérouler sur le territoire français ou en Europe » [nouvellement précisé ; cas issus de délibérations de décembre 2023 et d'avril 2024].

Une formation réalisée à l'étranger, hors EEE et Suisse est, de manière constante suivant les deux instructions, à exclure.

Sur les obligations de l'employeur ou de l'organisme de formation interne ou externe

Ces obligations font nouvellement l'objet d'une sous-partie dédiée. Les possibles de recours aux périodes de formation à des heures de travail dérogatoires (nuit, dimanche par exemple), sont toujours indiqués comme devant être limités aux cas strictement nécessaires à la réalisation des objectifs de la formation. Il est en plus précisé que ces périodes ne sont possibles que dans les secteurs professionnels où la législation l'autorise.

Sur l'issue de la formation

Le bilan tripartite « doit » [anciennement « peut »] être établi entre France Travail, l'employeur et le demandeur d'emploi, en particulier en l'absence d'embauche ou en cas d'embauche dans des conditions moins favorables pour le salarié que celles initialement prévues par l'employeur.

Sur le versement de l'aide

L'instruction indique que l'aide est versée par France Travail « sous réserve de la réception de la facture via Chorus Pro ».

France Travail et autres acteurs mobilisés

La diligence des agences France Travail dans le cadre du traitement de la POEI est appelée dans l'instruction de 2024. Il est ainsi indiqué que lors de la demande de l'employeur, celui-ci peut solliciter l'appui d'un conseiller France Travail qui l'accompagnera tout au long de sa demande. Pour le versement de l'aide, les agences s'assurent de leur bonne articulation (détermination de l'agence compétente) afin de permettre la mise en œuvre la plus efficace et la plus rapide du versement.

Il est précisé que « les Missions locales et les Cap emploi peuvent être associés à l'instruction de la POEI. Et l'APEC en sa qualité d'opérateur du CEP pourra également être associée ».

Précisions opérationnelles

  • Un référentiel « repère » des coûts horaires par formation individuelle, sur la base du formacode, sera mis à disposition des équipes locales de direction au cours du 2nd semestre 2024, notamment pour guider les décisions de validation des devis présentés à France Travail.
  • Dans le cadre des modalités d'exécution de la POEI, un plan de formation est établi sur la base d'un devis de l'employeur. Un modèle de plan fourni en annexe peut être utilisé par ce dernier et/ou par l'organisme de formation.
  • Les annexes, non publiées, sont disponibles sur demande.

 

Instruction n° 2024-26 du 22 juillet 2024 (BOFT n° 2024-44 du 2.8.24)

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Fiche 35-17 : Préparation opérationnelle à l'emploi individuelle (POEI)