Précision sur l'objet des RTT et des congés payés
Par Romain Pigeaud - Le 17 novembre 2008.
La Cour de cassation vient d'apporter une importante précision relative à la réduction du temps de travail : "Les jours de récupération, qui sont acquis par le salarié au titre d'un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail et représentent la contrepartie des heures de travail qu'il a exécutées en sus de l'horaire légal ou de l'horaire convenu, n'ont ni la même cause ni le même objet que les congés payés d'ancienneté auxquels il a droit, en sus de ses congés légaux annuels."
Cour de Cass. Assemblée plénière 24.10.08, pourvoi n° 07-42799
Si cette jurisprudence ne vise pas directement le hors temps de travail dans le cadre d'une formation, elle ouvre des perspectives conséquentes dans ce domaine. En effet, les entreprises s'interrogent souvent sur les modalités pratiques de mise en place d'une formation sur du hors temps de travail, et plus précisément sur les périodes où il est possible de demander à un salarié de participer à une formation en dehors de ses horaires de travail.
La cour de cassation confirme que les jours de RTT sont la contrepartie d'un dépassement de l'horaire de travail, qu'ils n'ont pas le même objet que les congés payés.
Ainsi une formation suivie en dehors du temps de travail pourrait bien être suivie lors de RTT. Car contrairement aux congés payés, les RTT n'ont pas pour objet d'accorder un repos au salarié. Ils sont la contrepartie des heures de travail qu'un salarié a exécutées en sus de l'horaire légal ou de l'horaire convenu.
Rien ne s'opposerait alors à ce que les RTT soient utilisées pour suivre une formation.
Cette décision peut être comparée avec une autre jurisprudence récente d'une Cour d'appel qui concernait la possibilité pour un employeur de demander à un salarié de suivre une formation sur ses congés payés.
La Cour d'appel avait confirmé l'interdiction d'exercer un travail rémunéré pendant des congés payés. Cette interdiction est maintenue lors d'une formation professionnelle en vue de l'obtention d'une qualification car cette dernière constitue une modalité d'exercice d'un travail.
L'objet des congés payés est de permettre la mise en pratique du droit au repos du salarié, ce qui est incompatible avec une activité professionnelle.
Dans les faits, la formation suivie pendant les congés payés avait donné lieu à une infraction par l'inspecteur du travail :
"Si Monsieur X...invoque le non- respect de la durée du travail, il n'en justifie pas directement. Néanmoins, l'infraction relevée par l'inspecteur du travail le 20 novembre 2006 et portant sur " l'interdiction d'exercer un travail rémunéré pendant ces congés " s'inscrit dans ce contexte. Alors que Monsieur X...était en formation professionnelle en vue de l'obtention d'une qualification de chauffeur de taxi (du 19 juin au 03 septembre 2006), la société AD lui a décompté des congés du 19 au 30 juin et du 1er au 31 juillet soit un total de 36 jours. La régularisation a été faite mais après l'annonce de la transmission du procès verbal d'infraction au Procureur de la République. Il convient de souligner qu'une régularisation de salaire (1. 327, 91 euros) en a résulter. Ainsi, la société AD a voulu échapper au paiement du salaire dû et dans le même temps privé le salarié de ses congés acquis. Il n'y a pas place ici à la bonne foi. "
Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion du 24.6.08, n° 07/02199
Le droit communautaire s'est intéressé au sujet des congés payés et a confirmé qu'ils ne pouvaient donner lieu à un renoncement en contrepartie d'une indemnité financière.
Selon une jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes : "la possibilité d'une compensation financière pour le congé annuel minimal reporté créerait une incitation à renoncer au congé de repos ou à faire en sorte que les travailleurs y renoncent", ce qui est incompatible avec les objectifs d'une directive communautaire sur le temps de travail qui impose aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, cette période minimale ne pouvant être remplacée par une indemnité financière.
Arrêt de la CJCE du 6.4.06
Federatie Nederlandse Vakbeweging/Staat der Nederlanden
Affaire C-124/05