Recours au CDD d'usage pour un formateur : requalification en CDI
Un organisme de formation peut-il avoir recours au CDD d'usage exclusivement dans le cadre des marchés publics sans bons de commandes garantis, lorsque le personnel enseignant permanent engagé par contrat à durée indéterminée se révèle insuffisant ?
Par Valérie Michelet - Le 06 février 2017.
La Cour de cassation répond par la négative dans une décision du 26 janvier 2017.
Les faits étaient les suivants : engagée sous divers CDD d'usage successifs à compter du 25 octobre 2011 (à l'exception d'une interruption entre le 30 juin et le 5 septembre 2012) une formatrice demandait la requalification de sa relation contractuelle en CDI. Les juges du fond lui ont donné raison. L'employeur conteste leur décision mais la Cour de cassation ne le suit pas dans ses conclusions.
Pour les juges de la Haute cour, les juges du fond ont justifié leur décision en relevant :
1° que la salariée avait travaillé de manière quasi continue durant deux ans et demi pour (l'organisme de formation) en vertu de quinze contrats à durée déterminée pour occuper toujours le même poste ;
2° que ses fonctions :
- correspondaient à l'activité principale de l'employeur,
- avaient toujours été les même,
- et n'étaient pas dispersés géographiquement.
Le recours au CDD d'usage, autorisé dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, pour des emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée, du caractère par nature temporaire de ces emplois et de l'existence de raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets.
Ce recours est notamment autorisé pour les activités d'enseignement et la CCN des Organismes de formation l'encadre (article 5). Le recours aux CDD n'est ainsi possible dans deux cas :
- pour une action occasionnelle de l'organisme de formation lorsque celui-ci ne dispose pas dans son effectif de formateurs pouvant mettre en œuvre la formation visée ;
- pour une activité permanente si l'effectif de l'organisme de formation ne lui permet pas de faire face à la formation visée en cas de dispersion géographique des formations, de formations occasionnelles, d'accumulation de formation sur une même période.
Les juges du fond, se fondant sur cette règlementation ont jugé, au regard des faits qui lui étaient soumis que le recours au CDD n'étant ni occasionnel, ni accumulé sur une période où l'entreprise était surchargée, ni même dispersé géographiquement, l'emploi occupé par la formatrice n'était pas temporaire mais avait pour objet de pourvoir à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
L'employeur avait tenté de faire valoir que les stages sur lesquels la salariée était affectée relevaient de marchés publics annuels à bons de commande, subordonnés à des commandes mensuelles d'heures confirmées le mois précédant leur déclenchement en sorte que l'employeur n'avait aucune visibilité sur la durée du marché et le nombre d'heures de formation à venir,et que cette imprévisibilité justifiait le recours à des contrats à durée déterminée ayant pour seule finalité de faire face à l'incertitude de la consistance des marchés et de compléter le personnel permanent.
Les juges ne le suivent pas, s'en tenant à une lecture stricte des textes concernant l'application de ce contrat d'exception qu'est le CDD d'usage.
Cour de cassation, chambre sociale, 26 janvier 2017, n° de pourvoi: 15-26845, non publié au bulletin