Contrat d'apprentissage : période d'essai et droit à résiliation en cas de succession de contrat
Une décision de la Cour d'appel de Nîmes du 9 décembre 2024 apporte un éclairage sur la question de la période d'essai en cas de contrats d'apprentissage successifs.
Par Valérie Michelet - Le 06 janvier 2025.
Un des apports de la décision rendue par les juges de la Cour d'appel de Nîmes est de rappeler que le contrat d'apprentissage ne comporte jamais de période d'essai, qu'il s'agisse du contrat initial ou de contrats successifs, conclus pour achever la formation ou pour en préparer une nouvelle. Cette position doit être applaudie en ce qu'elle est conforme à la rédaction de l'article L6222-18 du Code du travail telle qu'issue de la loi du 5 septembre 2018.
L'ancienne rédaction de l'article L6222-18 du Code du travail précisait en effet que "les articles L1221-19 et L1242-10 étaient applicables lorsque après la rupture d'un contrat d'apprentissage, un nouveau contrat est conclu entre l'apprenti et un nouvel employeur pour achever la formation". Il s'en déduisait d'une part que le délai, alors de 2 mois, pour rompre le contrat d'apprentissage initial de manière unilatérale n'était pas assimilable à une période d'essai, ce qu'avait d'ailleurs confirmé la Cour de cassation, dans une décision du 12 septembre 2018. Et d'autre part, que lors de la conclusion d'un second contrat d'apprentissage pour achever la formation, le droit à résiliation unilatéral était épuisé, seule une rupture de période d'essai, si cette dernière avait été prévue, était possible. Ce point avait d'ailleurs été confirmé par la Cour de cassation dans une décision du 25 octobre 2017.
Mais alors, quel est le statut de la période de 45 jours de formation pratique en entreprise ?
C'est là que réside le second apport de la décision du 9 décembre 2024. Les juges du fond y précise que l'article L6222-18 du Code du travail qui prévoit que "le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des 45 premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti" instaure uniquement un droit à résiliation.
Immédiatement, se pose la question de la survie de ce droit à résiliation lors de la conclusion de contrats d'apprentissage successifs.
La lecture de la décision de la Cour d'appel de Nîmes invite à la réflexion. La Cour observe d'une part, que le point de départ du délai de libre résiliation se situe à la date à laquelle l'apprenti débute sa formation pratique, d'autre part, que dans leur nouvelle rédaction supprimant la référence à la période d'essai, les articles L6222-18 et R6222-21 du Code du travail n'ont pas remplacé le recours à la période d'essai en cas de nouveau contrat d'apprentissage, par l'instauration d'un nouveau délai de libre résiliation.
Il y aurait donc lieu de distinguer :
- la succession de contrats d'apprentissage pour achever une formation ;
- la succession de contrats d'apprentissage pour préparer des diplômes différents.
Dans le premier cas, le droit à résiliation est épuisé après les 45 premiers jours de formation pratique, même en cas de changement d'employeur.
Dans le second cas, en l'absence de précision du législateur, il serait possible d'appliquer le droit à résiliation à la nouvelle période de 45 jours de formation pratique en entreprise.
Une position du juge de la Cour de cassation sur cette interprétation serait la bienvenue pour lever cette incertitude source d'insécurité juridique.
Cour d'appel de Nîmes, 9 décembre 2024, RG n° 22/04043
Pour en savoir plus, Les Fiches pratiques du droit de la formation : Fiche 32-27 : Ruptures anticipées du contrat d'apprentissage