Déclaration d'activité : rappel du Conseil d'Etat sur les conditions d'annulation par l'administration
L'administration peut-elle annuler la déclaration d'activité d'un organisme de formation au motif que les formations délivrées n'entraient pas dans le champ de la formation professionnelle continue alors que ces dernières n'avaient pas changé depuis le dépôt de la demande de déclaration d'activité ?
Par Valérie Michelet - Le 24 octobre 2022.
Le Conseil d'Etat répond par la négative à cette question dès lors que l'activité faisant l'objet de la formation n'était pas illicite et que l'organisme de formation faisait valoir que le contenu de la formation dispensée et les supports utilisés étaient restés inchangés depuis leur création (Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 20/10/2021, 440377).
En l'espèce, l'administration a annulé la déclaration d'activité d'un organisme de formation au motif que les formations qu'il délivrait ne pouvaient être regardées comme entrant dans le champ des actions de formation professionnelle dès lors qu'elles exposaient leurs participants à l'exercice d'une activité médicale passible de l'incrimination d'exercice illégal de la médecine. Ces formations s'adressaient en effet à un public hétérogène non constitué de médecins ou de personnes exerçant dans le domaine paramédical.
La décision de l'administration a été validée par les juges du fond (CAA de PARIS, 3ème chambre, 03/03/2020, 19PA02010).
Le Conseil d'Etat censure les juges de la Cour d'appel administrative de Paris.
Certes, il rappelle, comme les juges du fond, qu'une activité illicite ne saurait relever de la formation professionnelle continue, ni par suite donner lieu à enregistrement lorsque ce caractère illicite apparaît au vu de la déclaration de l'organisme prestataire. Et c'est justement là que le bât blesse ! En effet, les actions de formation litigieuses étaient les mêmes que celles présentées lors de la demande d'enregistrement de la déclaration d'activité. L'activité de l'organisme de formation était donc bien apparue comme licite pour l'administration.
Or la déclaration d'activité, comme le souligne le Conseil d'Etat n'est pas une décision administrative "neutre" pour l'organisme qui en bénéficie, plusieurs droits spécifiques en découlent (exonération de TVA notamment) et c'est compte tenu de ces droits que l'organisme tient de la déclaration d'activité que cette dernière ne peut être annulée, au-delà d'un délai de quatre mois, que pour l'avenir et uniquement dans l'une des trois situations suivantes :
- fraude lors de la demande de déclaration,
- motif reposant sur une circonstance postérieure à l'enregistrement,
- motif reposant sur une circonstance que l'administration n'était pas en mesure de retenir à la date de l'enregistrement au vu de la déclaration préalable.
Les juges du fonds auraient donc du rechercher si des éléments permettant de vérifier que l'une de ces trois situations existaient. A défaut, ils ne pouvaient confirmer la décision de l'administration d'annuler la déclaration d'activité. L'affaire est donc renvoyée devant la cour administrative d'appel (CAA) de Paris.
Le 26 septembre 2022, les juges de la CAA de Paris s'alignent sur l'analyse du Conseil d'Etat (CAA de PARIS, 8ème chambre, 26/09/2022, 21PA05773).
Devant cette cour, l'administration arguait cette fois qu'au moment de l'enregistrement de la déclaration, le contenu des prestations réalisées par l'organisme, et la mention des spécialités de formation santé et psychologie dans le bulletin de déclaration déposé, n'apportait aucune précision sur le contenu des programmes, l'identification des publics concernés ou encore l'objectif assigné aux actions. En conclusion : l'administration pouvait annuler la déclaration d'activité puisqu'elle s'était fondée sur des motifs qui n'étaient pas connus d'elle au moment de l'enregistrement de cette déclaration, à savoir le contenu des prestations réalisées.
Elle n'est pas suivie par les juges du fonds.
Ces derniers constatent que l'organisme a bien mentionné dans son formulaire de demande de déclaration que ses prestations avaient notamment pour spécialités la psychologie et la santé. Ainsi, dès l'examen de la demande d'enregistrement de la déclaration d'activité, contrairement à ce que soutient l'administration, les éléments descriptifs de l'activité de l'organisme à savoir notamment sa spécialisation dans des formations relevant du domaine de la santé, permettaient à l'administration d'apprécier, au besoin en demandant des informations complémentaires, si les prestations envisagées entraient ou non dans le champ de la formation professionnelle continue. Les circonstances que cette déclaration n'apportait aucune précision sur le contenu des programmes, l'identification des publics concernés ou l'objectif assigné aux actions ne pouvaient être regardées comme constituant une circonstance postérieure à l'enregistrement ou que l'administration n'était pas en mesure de retenir à cette date au vu de la déclaration préalable.
Pour l'organisme de formation, le feuilleton judiciaire s'arrête là. Et l'interprétation de la règle posée à l'article L. 6351-4 du code du travail est stabilisée : eu égard aux droits que l'organisme dispensateur de formation professionnelle tient de l'enregistrement de sa déclaration d'activité, celle-ci ne peut, en l'absence de fraude, être annulée, au-delà d'un délai de quatre mois, que pour un motif reposant sur une circonstance postérieure à l'enregistrement ou que l'administration n'était pas en mesure de retenir à cette date au vu de la déclaration préalable.
Pour tout comprendre sur la déclaration d'activité et sur les règles de fonctionnement qui s'imposent à un organisme de formation, participez à notre session « Respecter les obligations d'un organisme de formation » – prochaines dates en distanciel des 7 au 9 novembre 2022.
Pour aller plus loin (accès abonné) - Fiche 13-5 - Annulation de la déclaration d'activité