Loi Avenir professionnel : publication de l'ordonnance "coquilles"
Prévue par l'article 114 de la loi du 5 septembre 2018, l'ordonnance du 21 août 2019 publiée au JO du 22 Août 2019 vise notamment à harmoniser l'état du droit, assurer la cohérence des textes, abroger les dispositions devenues sans objet et remédier aux éventuelles erreurs matérielles. Présentation des principales dispositions intéressant la formation et l'apprentissage.
Par Valérie Michelet - Le 23 août 2019.
Comme le précise le Rapport au Président de la République, l'ordonnance du 21 août 2019 vise "à consolider l'articulation juridique des mesures déclinées par la loi précitée. Elle vient harmoniser l'état du droit, assurer la cohérence des textes, abroger les dispositions devenues sans objet, remédier aux éventuelles erreurs matérielles, réécrire certaines dispositions afin d'en clarifier ou d'en préciser la portée, dans un souci de sécurité juridique et d'intelligibilité". Elle devrait être complétée par une seconde ordonnance qui permettra d'adapter les dispositions de la loi Avenir professionnel aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, notamment les dispositions relatives à la mobilité à l'étranger des titulaires de contrat d'apprentissage ou de professionnalisation.
Sécurisation des droits acquis au titre du DIF
Une incertitude pesait sur le sort des droits acquis au titre du DIF : elle est désormais levée. A condition d'avoir été reportées sur le SI du CPF avant le 31 décembre 2020, les heures de formation acquises jusqu'au 31 décembre 2014 au titre du DIF ne seront pas perdues. Elles seront converties en euros comme le prévoit la loi du 5 septembre 2018.
Cette incertitude était issue de deux dispositions, non codifiées, des lois du 5 mars 2014 et du 5 septembre 2018. La première prévoyait que les heures de DIF ne pouvaient plus être mobilisées après le 31 décembre 2020 alors que la seconde supprimait toute référence à des droits en heures en posant un principe de monétisation non seulement des droits acquis au titre du CPF mais également du solde d'heures de DIF. En conséquence, l'ordonnance abroge le V de l'article 1er de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.
Puisque l'ordonnance consacre en quelque sorte la "fusion" des droits DIF avec les droits acquis au titre du CPF, elle en tire aussi une autre conséquence : les droits acquis au titre du droit individuel à la formation sont désormais pris en compte pour le calcul des plafonds d'alimentation du CPF (articles L. 6323-11, L. 6323-27 et L. 6323-34 du Code du travail).
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 8
Extension du CPF de Transition professionnelle aux intermittents et aux intérimaires
La loi du 5 septembre 2018 supprime le Congé individuel de formation en lui substituant un autre droit à congé de formation spécifique : le CPF de transition professionnelle.
Le CPF de transition professionnelle est ouvert aux salariés titulaires d'un CDI ou d'un CDD mais, contrairement à ce qui préexistait avec le CIF, aucune disposition n'avait été prévue pour d'autres catégories spécifiques de salariés : les intermittents et les intérimaires.
Oubli désormais réparé : pour les salariés titulaires d'un contrat de travail conclu avec une entreprise de travail temporaire et les salariés intermittents du spectacle, un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'ouverture et de prise en charge des projets de transition professionnelle.
Article L. 6323-17-1 du Code du travail modifié
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 1, 51°
Actions éligibles au CPF pour les demandeurs d'emploi
Jusqu'à présent, les demandeurs d'emploi pouvaient mobiliser leurs CPF pour des formations concourant à l'accès à la qualification des personnes à la recherche d'un emploi financées par les régions, par Pôle emploi.
Cette faculté a été supprimée par l'ordonnance du 21 août 2019 et les actions de formation éligibles pour les demandeurs d'emploi sont alignées sur les règles de droit commun.
Article L. 6323-21 du Code du travail modifié
Article L. 6323-34 du Code du travail modifié
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 1, 53° 55
Institution d'un "droit d'option" pour les règles applicables à l'état des lieux dans le cadre de l'entretien professionnel
Jusqu'au 31 décembre 2020, l'employeur peut justifier de l'accomplissement de son obligation d'état des lieux du parcours professionnel du salarié lors de l'entretien professionnel de deux manières différentes :
- soit en appliquant la règle issue de la loi du 5 mars 2014, à savoir en démontrant que le salarié a bénéficié des entretiens prévus et d'au moins deux des trois mesures suivantes : 1° avoir suivi au moins une action de formation ; 2° avoir acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience ; 3° avoir bénéficié d'une progression salariale ou professionnelle ;
- soit en appliquant la règle issue de la loi du 5 septembre 2018, à savoir en démontrant que le salarié a bénéficié des entretiens prévus et d'au moins une formation autre que celles qui conditionnent l'exercice d'une activité ou d'une fonction, en application d'une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires.
On relèvera que cette option peut être exercée pour tous les entretiens d'état des lieux qui seront organisés en 2020 et non pas uniquement pour ceux qui doivent être organisés avant le 7 mars 2020.
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 7
Évolution du dispositif de Reconversion et promotion par alternance (Pro-A)
Plusieurs ajustements sont apportés au dispositif Pro-A par l'ordonnance du 21 août 2019.
L'objet de la reconversion ou la promotion par alternance n'a pas été modifié : ce dispositif vise toujours à permettre au salarié de changer de métier ou de profession, ou de bénéficier d'une promotion sociale ou professionnelle. En revanche, il est désormais prévu que cette finalité de promotion sociale peut être réalisée non seulement en suivant des actions de formation mais également par des actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience (VAE). Par ailleurs, la reconversion ou promotion par alternance peut permettre l'acquisition du socle de connaissances et de compétences.
Modification également du public éligible puisque la Pro-A concernera désormais également les salariés en activité partielle.
La liste des certifications professionnelles éligibles à la Pro-A sera définie par accord collectif de branche étendu. L'extension de cet accord sera subordonnée au respect des critères de forte mutation de l'activité et de risque d'obsolescence des compétences.
L'accord pourra par ailleurs prévoir que la rémunération du salarié en Pro-A est prise en charge par l'Opérateur de compétences, dans les conditions déterminées par décret. En conséquence, les missions des Opérateurs de compétences sont modifiées pour leur permettre de prendre en charge la rémunération des salariés bénéficiaires d'une action de reconversion ou de promotion par alternance.
Enfin, il est prévu qu'un décret viendra préciser les modalités d'application de ce dispositif.
Article L. 6324-1 du Code du travail modifié
Article L. 6324-2 du Code du travail modifié
Article L. 6324-3 du Code du travail rétabli
Article L. 6324-5 du Code du travail modifié
Article L. 6332-14 du Code du travail modifié
Article L. 6324-10 du Code du travail nouveau
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 1er, 56° à 63° et 70°
Mesures relatives à l'apprentissage
De nombreuses dispositions viennent sécuriser le recours à l'apprentissage.
Il est possible d'adapter la durée du contrat d'apprentissage afin qu'elle puisse être supérieure à celle du cycle de formation. Le rapport au Président de la République précise que cette adaptation doit permettre de "mieux tenir compte du parcours du jeune, comme par exemple de l'intégration d'apprentis au sein du service national universel".
Le statut de stagiaire de la formation professionnelle est reconnu à l'apprenti dont le contrat a été rompu et qui poursuit son cycle de formation au sein d'un centre de formation des apprentis, dans la limite de six mois.
L'ordonnance ouvre la fonction de maître d'apprentissage au conjoint collaborateur de l'employeur, aux côtés de l'employeur et d'un salarié de l'entreprise.
Des précisions sont apportées sur les modalités de dépôt du contrat d'apprentissage par l'opérateur de compétences : Le contrat d'apprentissage est transmis à l'opérateur de compétences, qui procède à son dépôt dans des conditions fixées par voie réglementaire.
Les centres de formation d'apprentis internes à une entreprise sont dispensés de l'obligation de préciser l'activité de formation en apprentissage dans leurs statuts. L'obligation de déclaration d'activité ne s'applique pas au centre de formation d'apprentis d'entreprise. Selon le Rapport au Président de la République cette exclusion s'explique par "des fins de simplification administrative". On relèvera que l'ordonnance substitue au vocable "service de formation dûment identifié " celui de centre de formation d'apprentis d'entreprise pour désigner la création d'un CFA au sein d'une entreprise.
Enfin, les conditions de mise en œuvre des préparations à l'apprentissage qui sont liées, notamment financièrement, au contenu du Plan d'investissement dans les compétences sont clarifiées. Ces préparations pourront être financées par l'Etat dans le cadre d'un programme national destiné à répondre à un besoin additionnel de qualification au profit de jeunes sortis du système scolaire sans qualification et des personnes à la recherche d'emploi disposant d'un niveau de qualification inférieur ou égal au baccalauréat.
Article L. 6222-7-1 du Code du travail modifié
Article L. 6222-18-2 du Code du travail modifié
Article L. 6223-8-1 du Code du travail modifié
Article L. 6224-1 du Code du travail modifié
Article L. 6241-2 du Code du travail modifié
Article L. 6231-5 du Code du travail modifié
Article L. 6313-6 du Code du travail modifié
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 1er, 34° à 42° et 45°
Répertoire spécifique : création d'un cas d'enregistrement de droit
Les certifications et habilitations établies par l'Etat requises pour l'exercice d'une profession ou une activité sur le territoire national en application d'une norme internationale ou d'une disposition législative ou réglementaire sont enregistrées de droit dans le répertoire spécifique.
Article L. 6113-6 du Code du travail
Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019, Article 1er, 22°